Matteo Penza
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© Matteo Penza 2024

Olives & Dérives

À l’ère du gallocène, aux abords des hyper centres de la métropole continue, certains savoir-faire se dissolvent au fur et à mesure que nos soft-skills d’auto-entrepreneurs s’affinent. Si l’on en croit mon feed Instagram, il nous reste le choix entre acheter sur internet des kits pour jouer à faire la cuisine sur nos plaques induction, devenir adeptes d’une étrange religion nutritionniste qui vénère des champignons aux noms latins, ou regarder des séries télévisées où de Grands Chefs Masculins nous dévoilent les secrets de la Haute Cuisine Internationale, pour qu’on les oublie une seconde plus tard. Savoir distinguer un olivier d’un platane n’a plus grand-chose d’évident.
J’exagère à peine.

Dans une économie monétaire, ce qui est au delà, ou en deçà - toutes les autres manières de penser et de faire le monde - subit la censure criarde d’une bannière de e-publicité qui nous invite à essayer gratuitement Amazon Prime. Le temps, en tout cas, n’est plus au grappillage.

Cueillir, transformer, conserver : pour que, pendant quelques minutes, on puisse reprendre la main sur des gestes discrets qui ne délèguent pas, ne coûtent rien.

Ce qu’on mange est une histoire qu’on raconte, qu’on se raconte. L’alimentation est un médium dense de symboles, de significations complexes qui « ont toujours une force expressive extraordinaire – celle que seuls les objets et les pratiques d’usage quotidien peuvent avoir » .
En un instant, la nourriture nous emmène des souvenirs de l’enfance aux plans locaux d’urbanisme, des odeurs de pain chaud, aux guerres destructrices. Impossible qu’il en soit autrement : la bouffe sans son contexte n’est que matière à décomposer, alimentation sans qualités, pure fonction biologique.

Les objets alimentaires parlent de politique, d’environnement, de paysages, d’économie, de grands-mères, de grands-pères. Ils véhiculent des histoires sociétales tout comme des histoires personnelles, là où les échelles narratives se croisent, se mêlent et se chevauchent. Là où l’intime (superlatif d’interne) devient universel.

Une archive alimentaire, un garde-manger survivaliste, une time capsule pour la postérité avec un message pour le futur : qu’il y a tellement plus de belles choses que celles que les algorithmes qui nourrissent nos feeds nous font croire.
Quelles histoires resteront demain de ce qu’on mangeait hier ?

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